J.O. Numéro 41 du 18 Février 1998
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Texte paru au JORF/LD page 02570
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Décision nos 97-2201/2220 du 13 février 1998
NOR : CSCX9802626S
AN, VAL-D'OISE (5e CIRCONSCRIPTION)
M. PHILIPPE METEZEAU, M. MICHEL BISCHOFF
Le Conseil constitutionnel,
Vu 1o sous le numéro 97-2201 la requête présentée par M. Philippe Metezeau, demeurant à Argenteuil (Val-d'Oise), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 11 juin 1997 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 5e circonscription du département du Val-d'Oise pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale, ensemble les pièces complémentaires enregistrées comme ci-dessus le 19 juin 1997 ;
Vu 2o sous le numéro 97-2220 la requête présentée par M. Michel Bischoff, demeurant à Argenteuil (Val-d'Oise), déposée à la préfecture du Val-d'Oise le 11 juin 1997, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 16 juin 1997 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ;
Vu les observations du ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 23 juin et 7 octobre 1997 ;
Vu les deux mémoires en défense présentés respectivement contre chacune des deux requêtes par M. Robert Hue, député, et enregistrés comme ci-dessus le 7 juillet 1997 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Bischoff, enregistré comme ci-dessus le 28 juillet 1997 ;
Vu le mémoire en réplique présenté par M. Metezeau, enregistré comme ci-dessus le 13 août 1997, ensemble les observations complémentaires du même requérant, enregistrées comme ci-dessus le 20 octobre 1997 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Bischoff, enregistrées comme ci-dessus le 23 octobre 1997 ;
Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, enregistrée comme ci-dessus le 13 novembre 1997, approuvant, après réformation, le compte de campagne de M. Hue, ensemble la décision rectificative, enregistrée comme ci-dessus le 15 décembre 1997, annulant et remplaçant la précédente sans en modifier la conclusion ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Metezeau, enregistrées comme ci-dessus le 22 décembre 1997 ;
Vu le nouveau mémoire en défense présenté par M. Hue, enregistré comme ci-dessus le 23 décembre 1997 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Metezeau, enregistrées comme ci-dessus le 5 janvier 1998 ;
Vu les observations présentées par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, enregistrées comme ci-dessus le 7 janvier 1998 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Metezeau, enregistrées comme ci-dessus le 16 janvier 1998 ;
Vu les observations complémentaires présentées par M. Hue, enregistrées comme ci-dessus les 3 et 11 février 1998 ;
Vu la loi no 88-227 du 11 mars 1988 modifiée relative à la transparence financière de la vie politique ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, et notamment son article 33 ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Considérant que les requêtes susvisées de MM. Metezeau et Bischoff sont dirigées contre les mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il soit statué par une seule décision ;
1o Sur la requête no 97-2201 :
En ce qui concerne le grief relatif à la liste électorale :
Considérant que le grief selon lequel de très nombreux électeurs inscrits sur la liste électorale n'auraient plus leur domicile à l'adresse indiquée sur celle-ci a été exposé pour la première fois dans les observations susvisées, enregistrées le 20 octobre 1997 ; qu'il est tardif et, par suite, irrecevable ;
En ce qui concerne les griefs relatifs au déroulement de la campagne électorale :
Considérant, en premier lieu, que le requérant met en cause l'importance de l'affichage effectué en méconnaissance des dispositions de l'article L. 51 du code électoral par M. Hue, ainsi que la lacération systématique de ses affiches sur les panneaux officiels ; que ces faits, dont l'ampleur n'est pas établie et qui ne sont d'ailleurs pas imputables au seul candidat élu, pour condamnables qu'ils soient, ne sont pas de nature à avoir altéré le résultat du scrutin, acquis avec 5 186 voix d'avance sur 37 762 suffrages exprimés ;
Considérant, en deuxième lieu, que le requérant expose que les moyens de communication audiovisuelle et la presse écrite auraient largement fait référence à la candidature du candidat élu, secrétaire national du Parti communiste français, dans la cinquième circonscription du Val-d'Oise ; qu'il en aurait résulté pour lui une inégalité de traitement ;
Considérant, d'une part, que la presse écrite a le droit de rendre compte librement d'une campagne électorale ; que, d'autre part, s'il est constant que la notoriété de M. Hue a eu pour conséquence un intérêt particulier des services de communication audiovisuelle pour sa candidature, il n'est ni établi ni même allégué que le candidat élu aurait tiré parti de ses interventions radiodiffusées ou télévisées, en sa qualité de secrétaire national du Parti communiste français, pour évoquer sa propre campagne ;
Considérant, enfin, que les allégations selon lesquelles le candidat élu aurait diffusé de fausses informations en se présentant en compagnie de dirigeants nationaux d'autres formations politiques de façon à faire croire qu'ils le soutenaient sont d'autant moins avérées qu'au second tour de scrutin ces dirigeants le soutenaient effectivement ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs susanalysés doivent être écartés ;
En ce qui concerne les griefs relatifs au déroulement du scrutin :
Considérant, en premier lieu, que l'absence accidentelle des bulletins de vote des candidats dans certaines des enveloppes devant contenir la circulaire et le bulletin de vote de chacun des candidats et adressées aux électeurs par le personnel de la préfecture du Val-d'Oise, agissant pour le compte de la commission de propagande, n'a pas eu pour effet de traiter certains d'entre eux de façon discriminatoire ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que des banderoles, demandant le maintien ou l'ouverture des classes, se trouvaient à l'entrée de certaines écoles publiques, momentanément utilisées comme bureaux de vote et que des travaux d'élèves commentant de façon humoristique l'actualité politique aient été laissés sur les murs, pour regrettable qu'elle soit, n'est pas de nature à avoir altéré la sincérité du scrutin ;
Considérant, en troisième lieu, que les modalités d'attribution des présidences de bureaux de vote ne font pas apparaître de manoeuvres ; qu'en tout état de cause les faits allégués sur ce point ne concernent pas le second tour de scrutin ;
Considérant, en quatrième lieu, que l'inachèvement de la composition du bureau lors de l'ouverture des opérations de vote dans le dixième bureau de la commune de Bezons, allégué par un des délégués, est contredit par les assesseurs ; que le fait que le nom des membres du bureau n'ait pas été porté sur le procès-verbal des opérations électorales au moment de l'ouverture du scrutin ne contrevient à aucune disposition du code électoral ;
Considérant, en cinquième lieu, que la présence simultanée, au cinquième bureau de vote de la commune d'Argenteuil, d'un des assesseurs, devenu momentanément président en application des dispositions de l'article R. 43 du code électoral, et du suppléant de cet assesseur ne méconnaît aucune disposition du code électoral ;
Considérant, en sixième lieu, que l'affirmation selon laquelle l'ordre des piles de bulletins de vote des deux candidats présentées aux électeurs dans le septième bureau de vote de la commune de Bezons n'aurait pas été conforme aux dispositions du code électoral est dépourvue de fondement, aucune disposition du code électoral n'imposant un ordre particulier ;
Considérant, en septième lieu, que, s'il est mentionné sur le procès-verbal des opérations électorales du troisième bureau de vote de la commune de Bezons, qu'un électeur aurait voté sans présenter de pièce d'identité, cette unique irrégularité ne saurait modifier le résultat du scrutin ;
Considérant, en huitième lieu, que la reconnaissance d'identité, par témoignage de deux électeurs du même bureau de vote, en vue de la délivrance à un électeur de sa carte électorale revenue en mairie pour cause de non-distribution par le service postal, mentionnée sur le procès-verbal dressé à cette occasion, est conforme aux cinquième et sixième alinéas de l'article R. 25 du code électoral, qui prévoit, pour la remise des cartes électorales, la même procédure quelle que soit la population de la commune ;
Considérant, en neuvième lieu, que les opérations de « double pointage » des électeurs, mentionnées dans les procès-verbaux des opérations électorales de quatre des seize bureaux de vote de la commune de Bezons, n'ont pas constitué, en l'absence de pressions sur les électeurs, une manoeuvre de nature à porter atteinte à la sincérité du scrutin ;
Considérant, en dixième lieu, que l'allégation selon laquelle, dans le troisième bureau de vote de la commune de Bezons, un électeur mandaté uniquement pour voter par procuration au premier tour de scrutin aurait été admis également à voter en lieu et place du mandant au second tour n'est pas confirmée par l'examen de la liste d'émargement de ce bureau ;
Considérant, en onzième lieu, que la présence de croix tracées de la même encre que celle qui a servi à l'émargement, dans un petit nombre de cases réservées aux émargements du premier tour dans le deuxième bureau de vote de la commune de Bezons, ne traduit l'existence d'aucune manoeuvre, ni même d'aucune irrégularité ;
Considérant, en douzième lieu, que l'utilisation d'une encre de couleur identique pour les deux tours de scrutin pour l'émargement par les électeurs du septième bureau de vote de la commune de Bezons ne contrevient à aucune disposition du code électoral ;
Considérant, en treizième lieu, que, si le requérant allègue le caractère suspect de onze émargements dans le huitième bureau de vote de la commune de Bezons, il résulte de l'instruction qu'il s'agit de courts paraphes dont rien ne permet d'affirmer qu'ils ne seraient pas authentiques ; que l'allégation selon laquelle, dans neuf bureaux de vote de la commune de Bezons, « plus de trois cents signatures sont sujettes à caution » n'est appuyée par aucun commencement de preuve ;
Considérant, en quatorzième lieu, qu'il n'est pas établi que, dans les septième et dixième bureaux de vote de la commune de Bezons, les délégués du candidat non élu aient été empêchés de remplir leurs fonctions de surveillance des opérations ;
Considérant, en conséquence, que les griefs tirés d'irrégularités ayant affecté le déroulement du scrutin doivent être rejetés ;
En ce qui concerne les griefs relatifs à l'utilisation de moyens publics :
Considérant qu'il est établi que la commune d'Argenteuil a fait bénéficier le candidat élu d'un vaste abri de plein air lui permettant de tenir une réunion publique le 26 avril 1997 ; qu'il est également établi que cette même commune a mis gratuitement à la disposition des autres candidats des salles équipées pour recevoir le public ; que, dans ces conditions, la commune d'Argenteuil ne peut être regardée comme ayant traité inégalement les candidats en présence ;
Considérant que, si le requérant soutient que la commune de Bezons aurait mis gratuitement un autocar à la disposition de M. Hue le soir du 30 mai 1997, il résulte de l'instruction que cette prestation a été facturée et qu'un titre de recette a été établi le 9 juin 1997 pour un montant de 970 F ;
Considérant qu'il est constant que l'éditorial du numéro de mai 1997 du mensuel de la commune d'Argenteuil était consacré exclusivement au rétablissement des finances communales, n'évoquait pas la campagne électorale et se bornait à indiquer brièvement « la non-revalorisation des dotations de l'Etat et les choix du conseil général » ; qu'on ne saurait, dès lors, considérer cet éditorial comme un instrument de propagande électorale ;
Considérant qu'il n'est pas établi que des fichiers de la commune d'Argenteuil aient été mis à la disposition du candidat élu ;
Considérant que la participation d'un agent communal à une réunion publique du candidat élu est intervenue en dehors des heures de service ;
Considérant que le soutien apporté à la candidature du candidat élu par un architecte connu, même si ce dernier intervient dans le cadre d'un programme urbain de la commune d'Argenteuil, ne saurait être considéré comme une utilisation des moyens municipaux ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs relatifs à l'utilisation de moyens publics doivent être écartés ;
En ce qui concerne les griefs relatifs au financement de la campagne du candidat élu :
Considérant, en premier lieu, que le grief selon lequel l'hebdomadaire du Parti communiste français dans le Val-d'Oise aurait publié des appels au soutien financier du candidat élu, sans reproduire, conformément aux dispositions de l'article L. 52-9 du code électoral, le texte de l'article L. 52-8 du même code, est dépourvu de portée, les dispositions de l'article L. 52-9 ne s'imposant qu'aux publications émanant du mandataire financier ;
Considérant, en deuxième lieu, que l'évaluation des dépenses du candidat élu fournies par le requérant s'appuie sur de simples estimations quant aux tirages d'affiches et de circulaires ; qu'en ne les retenant pas la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a approuvé à bon droit le compte du candidat élu ;
Considérant, enfin, que le requérant soutient qu'en recevant des contributions matérielles des sections d'Argenteuil et de Bezons et de la fédération du Val-d'Oise du Parti communiste français, qui n'ont pas de mandataire financier, le candidat élu aurait reçu des dons de personnes morales autres qu'un parti ou groupement politique ; qu'il aurait ainsi méconnu les dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral ;
Considérant qu'il est constant que les organisations susmentionnées ne sont que la représentation locale du Parti communiste français ; que ce parti relève des articles 8, 9 et 9-1 de la loi du 11 mars 1988 susvisée ; que, par suite, les dons consentis par les sections et la fédération ne sont pas proscrits ;
Considérant que les griefs relatifs au financement de la campagne électorale du candidat élu doivent donc être écartés ; qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par M. Metezeau doit être rejetée ;
2o Sur la requête no 97-2220 :
Considérant que, pour demander l'annulation des opérations électorales, le requérant allègue, d'une part, la présence, au premier tour de scrutin, d'un candidat dont les thèmes de campagne sur l'immigration, voisins des siens, auraient eu pour effet de l'empêcher de recueillir suffisamment de suffrages pour être présent au second tour de scrutin ; qu'il n'est pas établi que la candidature en cause ait été constitutive d'une manoeuvre ayant pour objet de créer la confusion dans l'esprit des électeurs ;
Considérant, d'autre part, que le requérant soutient que les affiches apposées par lui sur les panneaux officiels auraient été systématiquement lacérées ou recouvertes ; que ces faits ne sont établis que pour la journée du 13 mai 1997 ; que, dès lors, ils ne sont pas de nature à avoir altéré le résultat du scrutin ; qu'il résulte de ce qui précède que la requête présentée par M. Bischoff doit être rejetée,
Décide :
Art. 1er. - Les requêtes de MM. Philippe Metezeau et Michel Bischoff sont rejetées.
Art. 2. - La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 février 1998, où siégeaient : MM. Roland Dumas, président, Georges Abadie, Michel Ameller, Jean Cabannes, Maurice Faure, Yves Guéna, Alain Lancelot, Mme Noëlle Lenoir et M. Jacques Robert.
Le président,
Roland Dumas